XIII ème siècle – Reconquête ; version n°2
Posté par LPBSM le 5 février 2016
Bonjour,
Dans l’article précédent, on pourrait penser que Philippe II poursuit un but unique : l’accroissement du royaume et de ses possessions . Il cherchera, en effet, toute sa vie à récupérer l’Aquitaine (que son père Louis VII a perdue en ayant répudié la duchesse Aliénor ; Louis VII avait seize ans quand il succéda à son père . Son domaine propre s’étendait du Vermandois au Bourbonnais, sur les vallées moyennes de la Seine et de la Loire . De sa femme Aliénor ou Eléonore, fille unique du duc d’Aquitaine, il avait reçu en dot un fief immense, presque toute la France occidentale, de la basse Loire aux Pyrénées : Poitou, Périgord, Auvergne, Guyenne et Gascogne) .
Domaine royal hérité par Louis VII de son père Louis VI le gros
Nommé très jeune roi, après le décès de son père, Philippe II se marie, alors qu’il est lui-même mineur (il a 15 ans en 1180), avec une héritière prépubère (elle en a dix) qui lui amène dans sa corbeille une dot considérable, l’Artois, le Vermandois, le Valois et l’Amiénois . Soucieux de sa descendance, car au bout de quatre ans Isabelle de Hainaut ne lui ayant toujours pas donné d’enfant, il décide de se séparer d’elle .
L’Artois en 1477
Mais, grâce à ses bons conseillers et surtout à son Chapelain qui le suit depuis l’enfance (Son éducation est confiée à un petit nombre de précepteurs, contrairement à la tradition qui veut que le dauphin fréquente les écoles abbatiales), il se ravise comprenant qu’il va commettre l’irréparable comme son père Louis VII, se réconcilie avec sa jeune épouse, garde l’Artois, et arrive à obtenir un héritier au bout de sept ans . Elle meurt en 1189, donc trois ans après la naissance du futur Louis VIII, en couches (*1) .
Philippe II est obsédé par le fait qu’il hérite de ce qu’il estime être une dépossession territoriale qui réduit le royaume de France à une portion « de pauvre » comparée à celles de barons plus puissants et plus riches que le « roi de France » . Avec la même attitude que celle d’un grand bourgeois ou d’un gentilhomme campagnard, il fait grossir son capital en achetant des terres et en contraignant les serfs à payer leur affranchissement .
carte de la situation en 1154
Il défend également l’héritage artésien de son fils Louis en cherchant à accroître l’Artois et en rachetant des parcelles à divers châtelains .
Blason de la maison capétienne
Les résultats de ce règne fit, de la maison capétienne, la famille la plus riche de France . Au domaine étriqué de Louis VII, il ajouta l’Artois, l’Amiénois, le Valois, le Vermandois, les comtés de Clermont, de Beaumont et d’Alençon, enfin la Normandie, le Maine, l’Anjou et la Touraine . Il conquit la Touraine en y organisant partout des baillages à la place de l’omnipotence des prévôts dans ce comté . Au moment de sa mort, il avait réussi à étendre son autorité sur tous les grands fiefs : la Flandre, le Ponthieu, l’Auvergne se trouvaient sous son contrôle direct ; le comte de Champagne venait à peine d’échapper à sa tutelle ; le jeune duc de Bourgogne était pleinement soumis ; le Duc-Baillistre de Bretagne jusqu’en 1237 était une de ses « créatures » (*2) . Dans le Midi même, plusieurs seigneuries étaient entrées dans la mouvance directe de la couronne .
Philippe II est donc l’initiateur d’un état français, confondant pourtant le trésor du royaume et sa fortune personnelle dont il souhaitera disposer à son gré .
Sceau Royal de Philippe Auguste
Cette vision est bien évidemment fragmentaire voire très parcellaire .
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Naissance de Philippe II
Il serait souhaitable de rappeler qu’en août 1179 quand Louis VII, malade, décide de faire couronner son fils de 14 ans en la cathédrale de Reims, Philippe perd son escorte au cours d’une chasse près de Compiègne . Il va errer toute la nuit dans les bois de Guise-la-Motte et est retrouvé à l’aube par des charbonniers, tremblant de froid, hagard, incapable de parler .
Ramené à Compiègne, il va rester prostré plusieurs semaines, si bien que les médecins craignent une altération de sa santé mentale et même de son processus vital .
Louis VII annule le couronnement et bien que très malade, part en pèlerinage à Londres sur la tombe de Thomas BECKET (assassiné 9 ans plus tôt en sa cathédrale de Canterbury en 1170) et qui est devenu une sorte de saint thaumaturge .
Malgré l’épuisement provoqué par un si long voyage, les prières semblent avoir fonctionné puisque Philippe se remet doucement et le couronnement aura finalement lieu en novembre 1179 .
Couronnement de Philippe II dit Auguste parce que né au mois d’août (21 août 1165) .
Cet épisode, donne déjà une première information sur la « fragilité nerveuse » et la propension à l’acte manqué de cet adolescent lors de moments qui l’engage à assumer son futur rôle de roi sans doute trop lourd pour un adolescent qui n’aspire qu’aux plaisirs d’une vie choyée .
Nous allons voir que cette façon d’agir sera répétitive tout au long de son règne .
En 1184, Isabelle de Hainault, sa très jeune épouse, a tout juste 14 ans et Philippe II décide, sur un coup de tête, de la répudier . Le roi doit en effet faire face à une coalition de vassaux parmi lesquels on trouve le comte de Flandres et le comte de Hainaut, parents d’Isabelle . Furieux que son épouse n’ait pas su rallier son père à sa cause, Philippe II prétexte un lien de parenté avec la reine et surtout sa stérilité pour la répudier . Pourtant, Isabelle n’a que 14 ans et ne peut guère encore enfanter physiologiquement parlant .
Mais peu importe pour Philippe les lois de la nature ; la nature doit lui obéir et se soumettre à sa volonté comme tous ceux qu’il essaye de manipuler .
Isabelle de Hainault
Se doutant que le procès en répudiation va tourner à son désavantage, car elle a eu le temps de comprendre le caractère mystificateur de son époux, Isabelle décide de parcourir à pied, un matin de mars 1184, toutes les rues de Senlis en tenue de pécheresse, chemise blanche, un cierge à la main, en distribuant l’aumône, s’arrêtant dans chaque église de la ville, comme pour faire pénitence .
Le peuple qui s’émeut de la voir si misérablement vêtue, intervient en sa faveur en la ramenant au château auprès de Philippe II, réclamant au roi miséricorde pour son épouse . Devant la demande de son peuple mais surtout celle du Pape, et de ses conseillers, Philippe doit renoncer à son projet .
Dans son désir de toute puissance, Philippe ne supporte pas que les autres ne fassent pas ce qu’il a envisagé qu’ils fassent .
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Ce délire paranoïaque peut tourner à l’obsession comme le jour de son mariage avec Ingeborg de Danemark le 14 août 1198 où contrarié par une nuit de noce qu’il n’a pas réussi à assumer, il est envahi par des émotions qui le font somatiser . Ses yeux se révulsent et il est pris de sueurs profuses et de tremblements pendant la cérémonie du sacre en pleine cathédrale d’Amiens . Cette drôlesse lui a « noué l’aiguillette »(*3) et il ne peut même pas le dire car il serait immédiatement la risée de ses grands vassaux qui se gausseraient sous cape ou même ouvertement en le traitant d’impuissant . La blessure narcissique est telle, qu’il n’y a pour lui qu’une seule explication possible : Ingeborg l’a ensorcelé et il est la victime d’un maléfice .
Comme précédemment avec Isabelle, une fois la cérémonie terminée, il fait mander d’urgence son conseil et annonce sa décision de renvoyer illico Ingeborg à son frère le roi Knud IV de Danemark devant des conseillers médusés .
Pourtant la dot avait été âprement débattue et fixée à 10 000 marcs d’argent, une lourde charge pour un si petit royaume ; mais comme à son habitude, Philippe se comporte comme un petit boutiquier de bas étages . A 15 ans, déjà, il avait adopté des méthodes de petit escroc en rançonnant les Juifs, au début de son règne, pour remplir les caisses royales laissées vides par son père . Il faut quand même préciser qu’il y est largement encouragé par son entourage d’évêques qui étaient tous favorables à l’idée papale d’entreprendre une troisième croisade pour délivrer le tombeau du Christ dont les juifs sont accusés d’avoir instrumentalisé la mort . Le 5 février 1180, Philippe Auguste condamne les dirigeants de la communauté juive à une amende de 15 000 marcs d’argent ; puis en 1182, il ordonne l’expulsion des juifs qui pourront revenir à condition de payer de lourdes taxes en 1198 .
Armoiries du Danemark
Le choix d’Ingeborg ne s’était pas fait au hasard ; en effet, Ingeborg descend par les femmes du roi Harold II mort à la bataille d’Hastings contre Guillaume de Normandie, futur roi d’Angleterre et fondateur de la dynastie anglo-normande . Philippe II pense avoir trouvé un moyen de pression avec l’antériorité des droits de sa future épouse Ingeborg ; droits qu’il aurait envisagé de faire valoir par la force et avec le concours des princes danois et de leur flotte .
Mais malgré le désir de voir son plan machiavélique aboutir, la blessure infligée à son petit égo est la plus forte et il réagira comme le gamin capricieux qu’il a toujours été en utilisant les mêmes vieilles ficelles de justification de consanguinité et il obtiendra l’annulation de son mariage le 5 novembre 1193 (moins de trois mois après le sacre) par le tribunal ecclésiastique de Compiègne après une parodie de justice .
Le pape Célestin III, qui a plus de quatre-vingts onze ans en 1196, refuse de ratifier le jugement d’annulation ; mais Philippe n’en a cure et épouse rapidement Agnès de Méranie le 1er juin . Deux ans plus tard, Célestin III meurt (le 8 janvier 1198) et est remplacé par un pape de trente huit ans qui prend le nom d’Innocent III .
Innocent III ou le cardinal Lothaire de Segni
A la fin de l’année 1198, ce pape n’hésite pas à jeter l’interdit sur le royaume de France et décrète l’excommunication de Philippe II au motif que « la dignité du Roi de France ne le place pas au-dessus des devoirs chrétiens du plus simple de ses sujets » . Selon le droit canon, le Roi de France est bien bigame (car il a épousé Agnès de Méranie le 1er juin 1196 malgré l’interdiction papale) .
L’interdit est la pire des choses qui peut arriver à un royaume chrétien car durant sa durée plus aucune célébration (baptême et extrême-onction) ou office religieux n’est autorisés . Si cette consigne n’est pas respectée, les célébrants et les fidèles sont passibles d’excommunication et promis à la damnation éternelle .
Aussi en 1200, sur le conseil des évêques du royaume, Philippe doit faire semblant d’accepter de se séparer officiellement d’Agnès de Méranie . Il va jusqu’à reprocher à son oncle, l’archevêque de Reims, le procès de Compiègne comme s’il n’en était pas l’instigateur … ! Lui, n’est absolument pas responsable … il est encore une fois la victime de son entourage !
Berthold IV comte d’Andrech et Duc de Méranie (duché qui ne durera que 95 ans) avec son épouse Agnès de Rochlitz et l’une de ses filles Agnès de Méranie qui deviendra Reine de France en 1196 morte en couches en juillet 1201 .
Devant cette preuve manifeste de bonne volonté, Philippe faisant mine de faire revenir Ingeborg à la cour, le légat du pape lève l’interdit sur le royaume et annonce la convocation d’un concile qui jugera la demande d’annulation du mariage du Roi de France .
Ce concile s’ouvre au début 1201 à Soissons ; puis Philippe voyant qu’il va être débouté et déclaré officiellement comme bigame, fait machine arrière, fait semblant d’accepter de reprendre son épouse officielle mais négocie la reconnaissance de ses deux enfants adultérins avec Agnès de Méranie (le boutiquier qui le hante ne le lâche pas) . Finalement, en juillet 1201, Agnès de Méranie meurt en couches à Poissy en ayant donné à Philippe Auguste un deuxième héritier mâle prénommé Tristan mais qui ne survivra pas . Le premier fils d’Agnès, prénommé Philippe (Agnès ayant donné naissance à une fille, nommée Marie, en 1198), sera reconnu comme tel par le pape Innocent III en novembre 1201 .
Philippe II essayera de nouveau en 1205 de justifier que le mariage n’a pas été consommé avec Ingeborg ; argument rejeté par l’église car Ingeborg prouvera aisément, témoins à la clef, les nombreuses visites de son époux après mariage .
Navire de transport pour la croisade aux couleurs du Temple (Robert de Sablé, ami de Richard est le grand-maître de l’ordre du Temple et s’embarque avec lui) .
Son comportement mesquin (Philippe Auguste instaurera un impôt spécial supplémentaire pour financer la 3ème croisade : la « dîme saladine », levée en 1188) et parjure ressortira pleinement lors de la troisième croisade quand Richard coeur de Lion, qu’il a monté contre son père Henri II pour servir ses intérêts, refuse de prendre Adèle, fille du roi Louis VII et sœur de Philippe en 1191, comme épouse . Il épousera Bérengère de Navarre , à 34 ans, sous la pression de sa mère Aliénor . Il est insupportable pour Philippe que son protégé puisse ne pas se soumettre à ses plans malgré le fait que sa demi-soeur Adèle de France ait été la maîtresse d’Henri II et mère d’un enfant de ce dernier, alors qu’elle avait été promise à Richard (*4) .
Richard avait sans doute quelques raisons d’en vouloir à son père, d’accepter l’appui que Philippe lui fournissait, mais également de ne pas souhaiter légitimer un enfant qui n’était pas de lui .
Remise des clefs de St-Jean d’Acre à Philippe et à Richard
Lorsqu’après le siège de Saint-Jean d’Acre et les renforts apportés par Richard, qui s’est attardé à Chypre afin de permettre le ravitaillement de son armée à Saint-Jean d’Acre, les assiégés de la ville d’Acre capitulent le 12 juillet 1191, Philippe ayant gagné une calvitie et la perte de l’usage d’un œil, justifie la nécessité de se retirer sous prétexte de maladie et ce afin de traiter une affaire d’héritage (Le comte de Flandres étant mort au siège d’Acre, Philippe réfléchit que l’Artois et le Vermandois, qui devaient lui revenir par succession, avaient pour lui plus d’importance que la Palestine) .
Il retourna donc en France, ayant juré à Richard qu’il n’abuserait pas de son absence pour lui faire tort ; mais il n’était pas plutôt rentré dans ses pénates qu’il accusa Richard d’avoir voulu le faire assassiner . Il paya, à contre coeur, le duc Léopold d’Autriche (Léopold V de Babenberg) qui capturera Richard sur son chemin de retour, près de Vienne à l’automne 1192, après que Richard ait subi un naufrage(*5), pour qu’il le retinsse prisonnier . Philippe profita de l’événement pour envahir la Normandie, puis pour traiter secrètement avec Jean sans Terre qui avait la régence en l’absence de son frère, et se faire promettre le Vexin, Tours, Amboise et Loches .
Richard finira par être vendu à l’empereur allemand Henri VI, fils de Frédéric Barberousse, mort en 1190 lors de la troisième croisade .
Gisant d’Aliénor morte à Poitiers, à l’âge de 82 ans, le 31 mars 1204
Cependant Richard obtint sa libération grâce à sa mère, Aliénor âgée de 77 ans, qui parvint à rassembler péniblement une énorme rançon de cent cinquante mille marcs d’argent (équivalant à deux années de recettes pour le royaume d’Angleterre) qu’elle apportera elle-même à Mayence (le 3 février1194) à l’empereur d’Allemagne Henri VI, lors de l’hiver 1193-1194 (voyage aller compris) ; l’empereur en profitera pour extorquer également à Richard un serment d’allégeance de la couronne d’Angleterre à l’Empire avec le devoir de payer un tribut de cinq mille livres sterling par an ainsi que la promesse de Richard de reconnaître l’empereur du Saint-Empire, Henri VI, comme suzerain à la place du roi de France .
Portrait de Richard coeur de Lion (Huile sur toile de Merry-Joseph-Blondel (1841) – Château de Versailles) entouré de deux écus en forme de « v » apparaissant au XIIIème siècle car plus maniables que les boucliers traditionnels très couvrants mais beaucoup plus lourds .
Revenu en Angleterre en mars 1194, il entreprendra aussitôt de se venger et ayant fait la paix avec son frère ; Richard (le roi en titre couronné le 3 septembre 1189 puisque l’aîné) commença par traiter avec Philippe II, lui donnant l’illusion qu’il lui laisserait une petite partie de ses conquêtes, puis organisa contre lui une coalition avec de grands vassaux comme les comtes de Flandres, de Boulogne, de Blois et de Toulouse .
Il obtint quelques succès militaires arrivant même à s’emparer du trésor royal le 5 juillet 1194, Philippe s’apprêtant à mettre le siège devant le château de Vendôme ; Richard qui mène une guerre d’escarmouches lui dresse un guet-apens près de Fréteval, au cours duquel il s’empare des bagages de Philippe, du sceau royal et de son chartrier (événement à l’origine de la création de la garde des archives royales, appelées Trésor des Chartes que Philippe-Auguste fera reconstituer en deux exemplaires ; l’un restant au château du Louvre à Paris) .
Château du Louvre à la fin du XIIème siècle et sa situation dans l’enceinte de Paris dite de « Philippe Auguste »
Avant son départ en croisade, Philippe Auguste fait construire pour défendre Paris une véritable muraille entourant Paris : plus de 5km sur 3m d’épaisseur et 9m de hauteur
La muraille comportait un chemin de ronde, des créneaux, des portes fortifiées et des tours rondes régulièrement espacées. Elle faisait le tour de la ville : 2800m sur la rive droite, 2600m sur la rive gauche, 3m d’épaisseur à la base, 9m de hauteur et une tour de 14m de haut tous les 70 mètres .
Les victoires de Richard deviennent de plus en plus fréquentes ; Philippe est battu en septembre 1198 entre Gamaches et Vernon et le 26 septembre, Richard s’empare des châteaux de Boury et de Courcelles ; puis, il bat près de Gisors les troupes de Philippe, venu au secours de ces places fortes .
La nouvelle qui parvient à Philippe en avril 1199, ne peut que le soulager . En effet, le 26 mars 1199, Richard, qui assiège le château de Châlus Chabrol (possession du vicomte Adémar V de Limoges, dit Boson), est atteint par un carreau d’arbalète tiré par un chevalier de petite noblesse limousine, Pierre Basile . La flèche est retirée mais la gangrène s’installe . Richard meurt le 6 avril 1199, onze jours après sa blessure .
Gisant de Richard à l’abbaye de Fontevraud
Débarrassé d’un fin tacticien, Philippe II pourra se consacrer à reconquérir les territoires perdus du temps de son père Louis VII, malgré les coalitions qui l’amèneront à écraser ses ennemis à Bouvines le 24 juillet 1214 . La bataille, proprement dite, ne durera que 5 heures .
Voici une version plus psychologique qui tranche singulièrement avec la présentation d’un roi exemplaire, courageux et valeureux, admirable, intègre et honnête, pourvu d’un volontarisme bénéfique à l’ensemble du royaume présentée dans le premier article et qui ressort de celle faite sur Wikipédia .
On peut aborder « l’Histoire » sous différents angles et Philippe Auguste en était pleinement conscient puisqu’il demandera à son chapelain Guillaume Le Breton de réécrire certains passages de la « Gesta Philippi-Augusti » écrite par le moine de Saint-Denis RICORD (Ricordus), médecin et chroniqueur, témoin visuel des actes de Philippe Auguste puisqu’il faisait partie de son conseil . Guillaume Le Breton transforma donc dans « La Philippide » l’histoire du règne de Philippe II, passant ainsi sous silence de nombreux faits qui ternissaient l’image d’un roi vertueux que souhaitait présenter Philippe à la postérité .
Cette « Version n°2 « , même si elle ne semble pas concerner directement la Bretagne, sera pleinement justifiée par la rédaction de l’article suivant sur Pierre 1er de Dreux, durant lequel nous allons rencontrer les mêmes écueils entre discours laudatif et l’envie de dénoncer un autoritarisme frisant souvent l’escroquerie .
Pierre 1er duc de Bretagne représenté sur un vitrail de la cathédrale de Chartres .
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Conclusion générale pour les deux versions présentées :
La philosophie qui se dégage de ces deux présentations de l’histoire d’un même règne, se rapproche plus d’une démonstration épistémologique que d’un désir de vouloir imposer une reconstruction de « l’Histoire » au profit d’une unique vision qui se voudrait incarner la seule valeur « morale » d’une société dans un siècle donné .
Nous aurions pu faire une version 3 ou une version 4 en abordant des éléments et faits historiquement reconnus sous un angle différent (il paraît évident que les versions anglaises ou allemandes sur la même période ne doivent pas être compatibles avec celle de la chronique de Guillaume Le Breton dans sa « Phillipide ») .
Même si le règne de Philippe II va permettre aux capétiens suivants de se tailler la part du lion (son successeur direct est « Louis VIII le Lion »), il ne laissera pas dans l’histoire de France l’aura que pourra acquérir un Louis IX sous le nom de « Saint Louis » à la fin du XIIIème siècle . Chaque société humaine a besoin de ses héros emblématiques .
Naissance de Philippe « Dieudonné » attendu durant 32 ans par Louis VII, son père, qui ne pourra pas assister à son couronnement car frappé d’hémiplégie au retour du pèlerinage sur le tombeau de Thomas Becket ; il mourra peu après, le 18 septembre 1180, à l’abbaye de Saint-Port .
Malgré des réformes de fond (C’est sous le règne de Philippe-Auguste que Paris, se modifie et devient l’une des villes les plus importantes d’Europe . Il fait entourer la ville de remparts, avant de partir pour la troisième croisade, et en fait paver les rues . Il réorganise la ville en créant des marchés et des hôpitaux . Il supervise lui-même la construction de la forteresse du Louvre ; en 1202, Philippe refuse de se joindre à la 4ème croisade qui aura lieu en 1204, prétextant qu’il a trop à faire dans son pays, avec ses 62 prévôtés (il n’y en avait que 41 en 1179), où il organise partout des baillages et des sénéchaussées afin de remplacer l’omnipotence des prévôts(*), surtout dans le Comté de Touraine .
Siège de Constantinople à la 4ème Croisade
Sur le plan de la lecture de cette version n°2, j’ai bien conscience que cet article est beaucoup trop long et qu’il aurait été plus agréable de le diviser en deux parties ; mais où en faire la coupure sans en détruire le suivi ? J’ai longtemps cherché sans trouver de meilleure solution .
Désolé de vous imposer un pensum un peu pénible par sa longueur .
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(*) À partir du XIème siècle, les Capétiens retirent l’administration du domaine royal aux nobles pour la confier à des prévôts, généralement des roturiers aisés, qui possèdent le droit de percevoir les revenus du roi dans leur conscription ou prévôté .
Cette pratique, bénéfique pour les finances royales à ses débuts, entraîne rapidement de graves abus et, dès la fin du XIIème siècle, le prévôt est contrôlé par un bailli dit « itinérant » ; puis, au XIIIème siècle, par un bailli et un sénéchal à poste fixe .
J.M. MARTIN pour LPSM
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P.S. :
Avant d’aborder les nombreuses notes de référence, cet exercice (celui de réaction d’un article) est avant
tout une synthèse qui essaye de faire un résumé de ce qui semble le plus caractéristique à mettre en valeur
pour l’auteur et on comprendra aisément que d’autres l’analyseront de façon différente, voire opposée .
C’est ce qui permet de faire la richesse des différentes propositions et d’en tirer, en fin de compte, sa
propre opinion, souvent en prenant comme crédibles certaines appréciations tout en se réservant le droit
d’en prendre d’autres qui semblent contradictoires avec celles exprimées dans un même document .
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- (*1) Elle serait morte en accouchant de jumeaux le 15 mars 1190, qui ne survivront pas, pour certains historiens et d‘un enfant mâle mort-né pour d’autres .
- (*2) Pierre de Dreux, de la famille capétienne, alors qu’il n’est que le deuxième enfant mâle de Robert II de Dreux dit le Jeune, sera choisi par Philippe après reconnaissance d’hommage lige pour se marier à Alix de Bretagne, fille aînée du Duc breton Guy de Thouars (mort en 1213) .
- (*3) Les aiguillettes sont des lacets généralement en cuir à bouts ferrés (parfois laiton ou cuivre) qui permettent de passer dans des oeillets et de fermer les chausses (nom de la partie du costume masculin) et permettant de ne pas baisser les chausses pour pouvoir uriner plus facilement . Fermées par un lacet au niveau des organes génitaux, les chausses permettaient de sortir le pénis rapidement si les noeuds de l’aiguillette ne coinçaient pas . L’aiguillette nouée ne permet plus d’accomplir cette action aussi facilement et, par extension, désignera l’impossibilité d’avoir un rapport sexuel ; l’expression « dénouer l’aiguillette » signifiera, bien évidemment, le contraire .
Chausses à fond plein
(certaines étant fendues à l’arrière, on devine aisément pourquoi, mais la chemise n’est pas rentrée dans les chausses dans ce cas) .
Détail
- (*4) Il faut quand même préciser qu’Henri II Plantagenêt avait fait venir à sa cour Adèle de France (Adélaïde ou encore Alix née en octobre 1160 – † en 1213) qui est la fille du roi Louis VII de France (1120 – † 1180 ) et de sa deuxième épouse Constance de Castille qui meurt le lendemain de la naissance de sa deuxième fille, Adèle .
En 1169, Adèle (qui est donc la demi-soeur de Philippe Auguste puisque la mère de Philippe est Adèle de
Champagne troisième épouse de Louis VII) est fiancée à Richard (le troisième fils des huit enfant
qu’Aliénor d’Aquitaine a eu avec Henri II Plantagenêt) .
Henri II fait venir sa future belle-fille à sa cour (elle a 9 ans), pour prendre possession
des terres constituant sa dot (le Comté d’Aumale et le Comté d’Eu) en lieu et place de son fils mineur (il a
exactement 6 ans) ; mais, à peine nubile, il abuse d’elle et en fait sa maîtresse .
Par le traité de paix signé le 30 septembre 1174 à Montlouis (ville située entre Tours et Amboise), le roi
Henri II renouvelle à Louis VII, la promesse du mariage entre Adèle et son fils Richard, mais il ne s’y tient
pas, et en 1177, le pape Alexandre III intervient pour le sommer, sous peine
d’excommunication, de procéder au mariage comme convenu . Le Berry devait être la dot qui revenait à
Richard .
Henri II renouvelle sa promesse en décembre 1183 puis en 1186, mais ne tient toujours pas ses
promesses . Entre temps, Adèle a fini par être enceinte des oeuvres de celui qui y planta son genêt voire
son jeunet puisqu’il s’agissait d’un enfant mâle .
Après la mort du roi Henri II, le 6 juillet 1189, son troisième fils et successeur, Richard « le Poitevin » (c’est
ainsi qu’on le surnommait), fit venir Adèle à Rouen en février 1190 .
Cependant en 1191, il avertit le roi de France Philippe-Auguste qu’il ne prendrait pas sa demi-sœur comme
épouse à cause du déshonneur qu’elle pourrait faire rejaillir sur lui et dont on l’accusait .
Après avoir tenté de la donner pour femme à Jean sans Terre (le frère cadet de Richard qui
maintenant se surnomme « Coeur de Lion », surnom acquis à la croisade), Philippe Auguste arrive enfin à la
marier le 20 août 1195 à Guillaume II de Talvas, Comte de Ponthieu jusqu’en 1221 . Elle apporte dans sa
dot le Comté d’Eu, le Comté d’Arques et un prêt de 5000 marcs . Cela prouve à quel point le besoin
d’argent était pressant pour accepter une épouse ayant un enfant illégitime d’un premier lit . Comme à
son habitude, Philippe qui se dit Auguste, ne fait pas un don, sachant l’autre aux abois, mais arrive à
négocier un prêt … !
Pourtant Guillaume II commanda l’aile gauche de l’armée du roi Philippe Auguste lors de la bataille de
Bouvines en 1214 .
Blason de Guillaumme II de Ponthieu
- (*5) Après que Philippe Auguste soit rentré en France et que Frédéric Barberousse ait été tué en 1190, Richard devient le seul chef de la troisième croisade continuant à lutter contre
Jean , son frère, tentant d’usurper le pouvoir (son père, Henri II, ayant toujours souhaité lui
laisser le pouvoir plutôt qu’à Richard qu’il détestait), Richard, quand il appris la nouvelle, signa aussitôt
avec Saladin une trêve de trois ans et s’embarqua pour l’Angleterre . Mais, en pleine mer Adriatique,
son navire, pris dans un ouragan, fit naufrage sur les côtes adriatiques, l’obligeant à poursuivre son
voyage par voie terrestre . Alors qu’il tente de trouver refuge auprès du duc de Saxe et de Bavière,
l’époux de sa soeur Mathilde, il pense qu’il sera bientôt dans son royaume sans que personne ne s’y
attende … (certains historiens prétendant que les nobles anglais se soient déguisés en marchands sans
en apporter les sources même si cela n’est pas, pour autant, un gage de fiabilité) . Pourtant ses plans
seront déjoués ; le duc d’Autriche, Léopold V de Babenberg, dont Richard avait un jour insulté la
bannière lors du siège de Saint-Jean-d’Âcre, et qui l’avait fait suivre, après s’être emparé de lui, près de
Vienne, avec un bon nombre de nobles anglais, le « livra » (*6) à l’empereur d’Allemagne, Henri VI .
Richard sera alors enfermé au château de Trifels (les trois pierres en allemand) au moins trois semaines
(peut-être même une année), et il ne recouvrira la liberté qu’après le paiement d’une rançon de 150 000
marcs d’argent réunie au bout de deux ans, le 4 février 1194 (*7) .
Troisième des huit enfants d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt, Richard est d’abord surnommé
« le Poitevin » : il n’est pas destiné à régner puisqu’il n’est pas l’aîné ; en revanche, il reçoit l’Aquitaine en
partage à 11 ans, et c’est au château de Poitiers qu’il grandit dans une atmosphère de poésie courtoise
et de chevalerie . Mais, emporté et ambitieux, il participe, avec son frère Henri le Jeune, à la révolte de
1173 contre Henri II, révolte soutenue par la France . Battu, il se soumet à l’autorité de son père .
En 1183, la mort de son frère aîné, Henri le Jeune, le désigne comme héritier du trône d’Angleterre et
du duché de Normandie . Pourtant il se bat une seconde fois contre son père, aux côtés de Philippe
Auguste ; Henri II perd la bataille et meurt peu après en 1189 au château de Chinon d’une
hémorragie digestive très probablement provoquée par un ulcère .
Henri II Plantagenêt en 1154
Richard est couronné à Westminster le 3 septembre 1189 . À peine roi, il regagne le continent sans
s’attarder sur cette île dont il ne parle pas la langue (on ne le surnommait pas Richard « le Poitevin » pour
rien) .
Richard s’embarque pour la 3ème croisade – Huile de G. Warren Philpot de 1827 .
En 1190, il s’embarque à Marseille en compagnie de Philippe Auguste pour la troisième croisade, mais il
s’arrête longuement en Sicile et enlève aux Byzantins l’île de Chypre, où il épouse Bérangère, fille du roi
de Navarre . Puis il rejoint Philippe Auguste qui assiège Saint-Jean-d’Acre .
Richard et sa femme Bérangère de Navarre qu’il épouse à Chypre
En 1199, un de ses vassaux, le vicomte de Limoges, trouva dans un champ, près de son château de
Châlus, une médaille d’or ancienne . On lui attribuait une certaine valeur . En tant que suzerain, Richard
prétendit qu’elle lui revenait de droit, le vicomte s’y opposa . Le roi, offensé, assiégea son château .
« Petite guerre, se dit Richard, dans quelques jours le vicomte se rendra » . Cependant, trois jours plus
tard, comme Richard caracolait hardiment près des remparts, une flèche l’atteignit à l’épaule .
On connaît la suite . Encore un caractère qui se croyait au-dessus des lois de la nature ; il est vrai qu’à
quarantre-deux ans … on peut encore avoir une légère propension à se sentir invulnérable .
Léopold V de Barenberg, Duc d’Autriche
- (*6) Vous allez rencontrer ce terme « livrer » dans de nombreuses parutions ; mais de nos jours, c’est un terme ambigüe car « La poste », « Chronopost » ou « Colissimo », prennent des frais pour la livraison . Ici, il faut bien comprendre qu’un otage est choyé car il représente une importante somme d’argent ; c’est un doux euphémisme pour expliquer qu’on fait du « commerce » (réservé aux juifs ou aux bourgeois) et qu’on va remettre le prisonnier au plus offrant .
Dans le cas présent, le Duc d’Autriche, ne se satisfait qu’un moment des sommes « à minima » envoyées par Philippe Auguste pour retarder la libération de Richard qui est gardé un certain temps à Dürnsteim (ou Dürrenstein sur le Danube) . La rançon énorme de six mille « Eimer» d’argent (environ 100 000 marks d’argent) demandée à l’empereur Henri VI et acceptée, semble bien plus profitable que les petites sommes parvenues difficilement de France . Cette manne sera utilisée pour la construction de la fonte de la nouvelle monnaie viennoise, d’une nouvelle enceinte fortifiée dont Vienne qui s’agrandissait avait besoin, ainsi que pour la fondation des villes nouvelles comme Weiner Neustadt et Friedberg .
Pour cet acte, le duc est excommunié et puni de l’interdit par le pape Célestin III . Cependant, cette décision ne semble avoir jamais été publiée . L’évêque de Vérone est cependant envoyé, par le pape, à Léopold V afin de lui transmettre les conditions pour lever l’excommunication . Léopold V doit libérer les otages anglais, repayer la rançon encaissée et partir en Terre Sainte en croisade pour la même durée que la captivité de Richard Ier d’Angleterre .
On comprends mieux pourquoi pour Henri VI, c’est un bon investissement qui va lui permettre de financer sa campagne militaire de reconquête du royaume de Sicile (conquête qui s’était arrêtée à Naples en 1191) car c’est un bâtard de Roger II, empereur normand de l’Italie du sud, Tancrède de Lecce, qui s’est fait reconnaître roi de Sicile par les barons normands, en lieu et place de Constance de Hauteville, fille posthume de Roger II roi de Sicile (Roger II de Hauteville, 3e comte de Sicile et 1er roi normand de l’île) à qui avait succédé Guillaume II de Sicile (son fils) mort sans descendance et donc neveu de Constance de Hauteville . Mais Constance est mariée à Henri de Hohenstaufen, fils de l’empereur Barberousse qui, à la mort de ce dernier, va devenir l’empereur de Saint-Empire Romain Germanique sous le nom d’Henri VI . Son époux réclame donc, au nom de son épouse, la succession légitime au trône de Sicile qui n’avait été pas été respectée par la noblesse normande en élisant Tancrède, un simple bâtard, comme roi .
Blason d’Henri VI
Henri VI passe pour le libérateur de Richard au yeux du pape et prend un petit bonus de 50 000 marcs, au passage, et une rente de 5000 livres sterling à verser annuellement pour couvrir très certainement …(!) les frais de bouche, sans pour autant subir l’excommunication et surtout l’interdit papale . Bien joué ! Non ?
Blason du duché d’Autriche (à gauche) postérieur à celui de Léopold V d’Autriche (sur la droite)
Léopold V d’Autriche va se casser une jambe après une chute de cheval lors d’un tournoi en novembre 1194 et meurt des « excellentes » saignées médicales prodiguées à l’époque, le 31 décembre 1194, l’excommunication ayant été levée sur ses promesses faites à l’évêque de Salzbourg, Adalbert, de se soumettre au pape et de partir en croisade, sans qu’il ait eu le temps de les tenir à l’âge de 37 ans .
En mai 1194, Tancrède meurt également et c’est son jeune fils de huit ans, Guillaume III de Sicile, qui lui succède . Nanti de la rançon de Richard, l’armée recrutée par l’empereur Henri VI ne rencontra que peu de résistance et Henri VI est sacré facilement roi de Sicile le 25 décembre 1194 . L’unique enfant issu de son mariage avec Constance (Frédéric-Roger du nom de ses deux grand-pères, le futur empereur Frédéric II Hohenstaufen), voit le jour le lendemain, près d’Ancône (qui se situe sur la côte adriatique à 360 km au sud-est de Venise et à 210 km au nord-est de Rome) .
Henri VI, fou de joie, se livre pourtant, quelques jours plus tard, à une répression brutale, ayant facilement emporté la victoire sur un gamin de 12 ans manquant cruellement d’expérience, en le faisant châtrer, en lui crevant les yeux et en le déportant en allemagne, puis en emprisonnant à vie le reste de sa famille . Les nobles et les évêques ayant assisté au sacre de Guillaume sont brûlés vifs dans un champ près de Palerme . Mais pas tous : les Filangieri, les Della Marra ou encore les Sanframondo, à titre d’exemple (ils sont trop nombreux pour tous les citer), préfèreront se soumettre à cette nouvelle domination et à servir les Hohenstaufen, conservant ainsi leurs biens .
Henri VI fait ensuite déterrer les restes de Tancrède et de son premier fils Roger III de Sicile . On arrache les couronnes d’or qui ornaient leurs dépouilles avant de décapiter les cadavres durant un cérémoniel ostentatoire .
Serait-ce un hasard si le surnom de « le cruel » avait été donné à Henri VI ?
Henri VI dans le codex de Manesse en 1300
- (*7) Sur la libération de Richard et de son « incarcération » à Trifels, il est quand même nécessaire de préciser que Richard bénéficiait, non seulement d’un régime qui pourrait paraître contraignant s’il n’était pas agrémenté de grandes libéralités :
L’historien Theodor Toeche (1837–1919), s’appuyant sur les lettres de Richard et les récits de contemporains neutres, dresse le tableau suivant de la situation :
Croix des Chevaliers Teutoniques
« Il avait la permission de se déplacer dans le pays à condition d’être accompagné de chevaliers teutoniques. Il avait tout loisir de s’entretenir avec les amis et compatriotes venus d’Angleterre pour l’encourager ou le conseiller. Il n’y a que la nuit qu’il devait rester seul. Et le roi ne perdit rien de sa bonne humeur ; ceux qui le voyaient le trouvaient joyeux et plein d’entrain. Ses principales distractions étaient le jeu, la lutte et les beuveries qu’il partageait avec ses gardes, et la retraite solitaire dans ses appartements. »
Extrait de https://fr.wikipedia.org/wiki/Blondel_de_Nesle .
La plus grande crainte de Richard étant que Philippe Auguste puisse réunir, avant sa mère, la somme exigée, et ses dépendances, pour sa « libération » ; ce qui se serait irrémédiablement transformé en un transfert dans une « oubliette » fortifiée .
Richard utilisa donc tout son talent diplomatique, pendant ce temps de douce réclusion, à essayer de réconcilier les princes rebelles allemands (voir lutte entre les Guelfes et Gibelins), avec son « geolier » . Cela pourrait paraître gaguesque aujourd’hui, mais, en fin politique et en fin tacticien, il ne pensait pas mourir dix ans après pour des vétilles .
Philippe et Richard à la troisième croisade
C’était pourtant bien mal connaître ou mésestimer le côté mesquin et grippe-sou de Philippe Auguste, dont Richard avait suffisamment côtoyé la cour, mais dont il connaissait parfaitement le désir obsessionnel de reconquête de territoires perdus qui appartenaient à sa mère, Aliénor, et où Richard avait passé une grande partie de son enfance .
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N.B. :
- Un certains nombre d’images proviennent du site de : http://jean-francois.mangin.pagesperso-orange.fr/capetiens/capetiens_5.htm ; mais comme la source n’est pas mentionnée nous ne pouvons vous la communiquer .
- D’autres images proviennent des nombreuses pages consultées sur Wikipédia .
- Pour résumer ce trop long article, un aphorisme me vient à l’esprit : « En politique, il faut suivre le droit chemin ; on est sûr de n’y rencontrer personne » .
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