Apogée du royaume breton
Posté par LPBSM le 26 novembre 2010
Bonjour,
Dans l’article précédent nous en étions restés au fait de la reconnaissance de la royauté bretonne d’Erispoë par Charles le Chauve, qui récupérera Rennes sous le nom de Redonas Oppidum .
Rennes avait été prise par Nominoë et sa puissante armée en 850 car seule une petite garnison franque défendait la ville .
Plus on laisse de soldats en garnison, plus l’armée se réduit . Voilà pourquoi, Charles le Chauve concédera au traité d’Angers les comtés de Rennes, Rezé (alors capitale du pays de Retz) et Nantes à Erispoë (fils de Nominoë) en confirmant sa royauté bretonne en septembre 851 . La carte ci-dessus montre les régions « dominées » de façon formelles (le frère de Nominoë contrôlant quatre divisions territoriales bretonnes sur les sept, bien qu’elles soient les moins prospères) par Erispoë avant le traité d’Angers .
La carte ci-dessous montre le pays de Retz :
Pour la petite histoire, Nominoë lors de cette conquête est mort un beau matin en montant sur son cheval, le 7 mars 851 . Il fallut faire des funérailles et les espions francs convainquirent les barons de l’armée franque de profiter de l’occasion pour attaquer l’armée bretonne qui à leurs dires commençait à subir quelques dissensions .
dessin de Nominoë victorieux à la bataille de Ballon (Abbaye de Ballon à Bains-sur-Oust près de Redon) en novembre 845 sur les troupes franques de Charles le Chauve plus nombreuses que les troupes bretonnes . Ce splendide dessin est de François MESNY (voir commentaires) .
Le résultat fut qu’Erispoë ayant été confirmé par les barons bretons comme chef de l’armée le 22 août 851 à Jangland-Beslé ou au Grand-Fougeray (près de la Vilaine) inflige un massacre de près d’un milliers de francs aux troupes de Charles le Chauve qui désertera son propre camp dans la nuit après le premier affrontement .
Il faut préciser que Charles le Chauve ayant eu des précepteurs ecclésiastiques était plus formé au latin et au grec ainsi qu’à la diplomatie qu’à l’art de la guerre .
Les faveurs accordées à Charles le Chauve par rapport à ses deux demi-frères ainés dans le partage de l’empire de Charlemagne, après la mort de Louis le Pieux en 840, par l’aristocratie franque au traité de Verdun, vont entraîner des guerres fratricides ainsi que d’incessantes tensions que les successeurs et héritiers de ses demi-frères feront peser sur le royaume de Charles le Chauve, la Francie Occidentalis .
Le royaume de Charles le Chauve est appelé la Francie Occidentale et celui de Louis le Germanique la Francie Orientale ; quant au royaume de Lothaire, il est tout simplement appelé la Lotharingie .
Voilà pourquoi Charles le Chauve préférera se faire des alliés des bretons, plutôt que des ennemis supplémentaires .
Les conflits de succession ne toucheront pas seulement le royaume des Francs ; Salomon fils du frère aîné de Nominoë (donc cousin d’Erispoë) est couronné en 857 après avoir fait assassiner Erispoë qui projetait de marier sa fille avec le fils de Charles le Chauve, Louis . L’intérêt en était que si ce mariage avait eu lieu, Erispoë aurait doté sa fille de territoires prélevés sur les anciennes « Marches »(*) que Salomon croyait être en sa possession . Charles le Chauve créant la dissension entre les bretons en acceptant l’allégeance du père de Salomon comte du Poher et frère aîné de Nominoë, ainsi que de Salomon lui-même réitérée en 852 .
(*) Les Marches sont des zones placées sous commandement militaire afin de contenir les attaques ennemies . De telles zones sont établies aux environs de Nantes et Rennes pour contenir les Bretons (Les Marches de Bretagne) ou en Espagne pour contenir les incursions Sarrasines (Les Marches Espagnoles) .
Sous Charlemagne, le Comte des Marches de Bretagne était le fameux Hruotland (Roland) jusqu’en 778 où il périra dans une embuscade basque vengeant les massacres de Pampelune (Iruña en basque) .
Malgré ce crime odieux, Salomon sera reconnu par tous les barons bretons comme leur roi en 857, sera confirmé dans sa royauté par Charles le Chauve en 868, et agrandira considérablement le royaume breton .
Après le traité d’Entrammes (juste sous LAVAL en Mayenne), il règne sur la région comprise entre la Sarthe et la Mayenne ; mais au traité de Compiègne, en août 867, Charles le Chauve lui attribuera Le Cotentin, l’Avranchin ainsi que les îles Anglo-normandes (non représentées sur la carte ci-dessous) .
Cette façon habile de neutraliser l’association de troupes Vikings avec les bretons en obligeant ceux-ci à défendre leur nouveau territoire contre les raids systématiques, de ceux qu’on va très vite appeler les normands, est digne d’un très bon politique qui sera reconnu comme empereur des Francs à la fin de son règne .
Rennes sera de 851 jusqu’à 875 intégrée au royaume breton, gérée par une administration bretonne, calquée sur l’administration franque, et protégée par une puissante armée .
Cependant elle reste confinée dans ses murailles et nous verrons dans le prochain article qu’elle a bien raison de le faire car maintenant va venir l’ére des Vikings .
… à suivre
J.M. MARTIN pour LPSM
N.B. La carte en grisé figurant dans cet article provient de l’excellent livre de Joël CORNETTE sur « l’Histoire de la Bretagne et des Bretons » Tome 1 aux Editions du SEUIL .
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